Genèse du projet
Le long du Rhin, de nombreux milieux ouverts, riches d’une biodiversité spécifique à ce biotope, sont soit laissés en libre évolution (et se couvrent alors de ligneux ou de plantes exotiques invasives), soit sont entretenus par des moyens mécaniques ; ces derniers présentent alors d’importants inconvénients (usage de carburant, tassement du sol, non sélection des plantes, uniformisation du terrain, coût, impact sur la faune, etc). A l’heure où la biodiversité et les milieux naturels en général sont particulièrement en danger, chaque action de protection compte. Forte de l’expérience de nombreux projets français et étrangers reposant sur la présence de grands herbivores d’espèces rustiques pour préserver ces habitats menacés, la LPO Alsace a ainsi relevé le challenge de mobiliser de nombreux partenaires pour mener ce projet de grande envergure.
Pourquoi des troupeaux ?
Durant la Préhistoire, de grands herbivores, tels que les chevaux sauvages, les aurochs et les bisons vivaient déjà dans les plaines alluviales des fleuves européens. Par la suite, le pâturage avec des animaux domestiques a fait partie intégrante du paysage traditionnel jusqu'à l'époque contemporaine (fin XIXe, début XXe siècles dans les plaines du Rhin supérieur). Ces herbivores sauvages ou domestiques entretenaient ainsi des espaces plus ou moins ouverts qui profitaient à une faune et une flore particulières.
Quels avantages ?
Le recours à du pâturage écologique composé d’animaux rustiques présente de nombreux avantages écologiques comme par exemples :
- Consommation sélective et étalée dans le temps de la végétation selon les préférences alimentaires des animaux présents, selon la valeur fourragère et l’appétence des végétaux, la saison, etc ;
- Piétinement différencié (zones peu ou fortement piétinées) ;
- Intervention possible sur tout type de sols, milieux, surfaces, tout ou partie de l’année, selon les animaux choisis ;
- Restitution au sol via les déjections, elles-mêmes précieuses pour un cortège d’insectes coprophages (renforcement de la chaine alimentaire) ;
- Mode d’utilisation compatible avec les inondations/exondations liées au changement climatique ;
- Les expériences faites dans les zones alluviales pâturées montrent que le pâturage se combine parfaitement avec les événements dynamiques des zones alluviales fluviales, à condition qu'il existe des zones de refuge situées plus en hauteur à l’abri des inondations ;
- Le pâturage est par ailleurs une alternative intéressante à l’agriculture dans les champs d’expansion des crues, après le recul des digues, profitant ainsi à la protection du risque d’inondation, à l’alimentation des eaux souterraines dans un contexte de changement climatique.
Objectifs du projet
Bien que le pâturage écologique soit pratiqué aussi bien en France qu’en Allemagne, il n’est pas suffisamment étudié. Et lorsque les études existent ici ou ailleurs dans ces pays et en Europe centrale, elles sont insuffisamment partagées, ni formalisées dans ce qui pourrait être un guide transfrontalier de mise en œuvre du pâturage pour la conservation écologique des milieux ouverts, avec ses effets sur la biodiversité et sa viabilité économique. Le projet « Biodiv’pâture » a de fait pour objectif premier d’améliorer la connaissance des effets du pâturage écologique sur la biodiversité, et plus particulièrement sur les espèces menacées des différents milieux présents dans la zone du Rhin supérieur (entre Bâle et Lauterbourg). Il a aussi pour objectif de proposer des réponses pratiques pour la mise en œuvre de différents modèles économiques de pâturage. Enfin, il propose de guider les gestionnaires des parcelles aux choix de gestion par rapport aux conséquences écologiques induites par le changement climatique (sécheresses, précipitations intenses, inondations).
Les partenaires
17 partenaires seront partie prenante de ce projet : 10 côté français (la LPO Alsace - porteur du projet-, Ville de Strasbourg, Petite Camargue Alsacienne, CEN Alsace, AERM, OFB, Région Grand Est, EDF Hydro, Jardins de Gaïa, Ville de Sélestat et 7 côté allemand (ILN et NABU Südbaden – partenaires associés principaux-, RP Freiburg, RP Karlsruhe, Gemeinde Kappel-Grafenhausen, Untere Naturschutzbehörde Germersheim, Biosphärenreservat Pfälzer-Wald-Nordvogesen), impliquant à la fois des financeurs et des partenaires techniques.
3 années d’étude, et plus si affinités !
A l’issue de ce projet, qui devrait finir le 30 juin 2026, les modèles élaborés et expérimentés sur des sites pilotes devraient idéalement pouvoir être appliqués concrètement, à une plus grande échelle, sur le secteur du Rhin supérieur. Avec à terme le rêve de voir à nouveau des bisons d’Europe pâturer (presque) librement en Alsace.