Deuxième loup abattu dans le Doubs : quand expérimentation rime avec extermination

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Tribune des associations FERUS, FNE Doubs, LPO BFC, le Pôle Grands Prédateurs, la SFEPM et Vigie Jura.

Quand arrive l’automne dans le Doubs, ce ne sont pas les feuilles mortes que nous ramassons à la pelle mais les loups abattus.

Un deuxième loup a été tué par des lieutenants de louveterie sur le secteur de Mouthe le vendredi 6 septembre, seulement quelques jours après la louve sur la commune des Villedieu. Après maintes réunions et entretiens avec les pouvoirs publics, nous, les associations de protection de la nature ne comprenons toujours pas quel est le but de «l’expérimentation territoriale» en cours dans le Doubs. S’agit-il de démontrer que lorsque l’on tire à balle réelle sur un animal, il a tendance à mourir ?

S’il s’agissait d’aider les éleveurs en difficulté, pourquoi renoncer à expérimenter les tirs d’effarouchement, (comme la DDT de la Haute Garonne l’a très récemment mis en place en missionnant les louvetiers / cf arrêté N°31-2024-397), et de chercher à voir si l’on peut « apprendre » aux loups à ne plus prédater les animaux d’élevage ?

Depuis près de 20 ans, des tirs de loups sont largement autorisés par l’État. Ni ce dernier, ni aucune étude scientifique n’a démontré que ces tirs avaient fait diminuer le nombre de prédations sur les troupeaux domestiques. Ces tirs ont même parfois des effets inverses à ceux souhaités ! Les tireurs jouent donc à la roulette russe avec une espèce protégée et font miroiter des solutions illusoires aux éleveurs. Encore une fois, cette stratégie mortifère fait perdre du temps (et des moyens) précieux à tous les acteurs concernés par la recherche de solutions efficaces et pérennes.

Le monde de l’élevage est confronté à la difficile question de la transition écologique, et, au même titre que nos territoires, il évoluera. À nous de choisir si cette évolution sera subie ou réfléchie. Pour l’heure, nous sommes forcés de constater que le plomb a plus de poids que la raison. Que l’urgence pour les services de l’État est de contenter aveuglément certains représentants de la profession agricole plutôt que de chercher des solutions durables, bénéfiques à la biodiversité comme aux métiers d’élevage.

Les moyens de protection, qui sont multiples et à perfectionner au cas par cas, sont la seule voie qui permettrait à l’élevage de coexister avec le monde sauvage. Pour accompagner les éleveurs dans cette transition, cet été, les bénévoles de FERUS et de Vigie Jura ont cumulé – par tous les temps – plus de 200 nuits de surveillance des troupeaux et ont fait fuir plusieurs fois des loups. D’autres acteurs de la biodiversité montent des programmes allant dans le même sens.

Ironiquement, les protecteurs de la nature seraient-ils donc les seuls à aider les éleveurs sur le terrain ?

Il convient également de rappeler que le loup est avant tout un prédateur d’ongulés sauvages et que son retour contribue à limiter les effectifs de certaines espèces à l’origine de dégâts importants sur les activités sylvicoles et agricoles.

La loi du Talion qui sévit dans le Doubs ne répond qu’à une pression politique et nous renvoie à une manière archaïque d’envisager la nature qui nous entoure. La volonté affichée d’éradiquer les loups de notre territoire est la preuve qu’en 2024, la démagogie, elle, n’est pas prête de disparaître.

Si la raison et la science n’ont pas leur place dans les prises de décision dans le massif du Jura, nous compterons sur la Justice (une fois encore) pour montrer, à minima, le chemin à ne pas suivre.