La vie secrète du cimetière du Bon Pasteur à Fougères (35)

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Au cimetière du Bon Pasteur, les locataires sont discrets... mais entre les tombes et les chapelles, c'est tout un monde qui s'anime ! Refuge LPO depuis cette année, ce cimetière est habité par de nombreuses espèces, faune et flore. On peut en observer quelques unes d'entre elles, lorsqu'on prend le temps de se pencher.

Belle Dame © Thibaut Desgarden

Entre les pierres on aperçoit un éclat bleu : il s'agit de l’Œdipode à ailes bleues, un criquet aux couleurs variées, allant du brun rougeâtre au gris, se fondant parfaitement dans son environnement. Ses élytres sont bleues turquoises et noires. Les gravions des allées lui permettent de se camoufler entièrement lorsqu'elles sont repliées sur elles-mêmes. Cette espèce préfère les zones sèches avec peu de végétation et se nourrit de graminées.

Lorsque nous continuons notre chemin, nous avons la chance d'entendre un Rougequeue noir. C'est un passereau à la queue rouge brique, qui chante d'une manière bien à lui : son chant ressemble à du papier que l'on froisse entre ses mains. Il ne passe pas inaperçu ! Habitué à vivre proche des constructions humaines, il installera son nid dans une cavité de bâtiment.

 

Rougequeue noir ©Thibaut Desgarden

Les cimetières sont des lieux de tranquillité pour la faune. Depuis que celui du Bon Pasteur est refuge LPO, la végétalisation apporte une plus grande ressource de nourriture, autant pour les oiseaux que pour les petits mammifères. À l'été 2024, Adélaïde Vialla, chargé d'étude naturaliste à la LPO Bretagne, a eu la chance de trouver des traces et indices pouvant confirmer la présence du Hérisson d'Europe. Ce petit mammifère cherche des invertébrés. L'aire vitale moyenne d'un Hérisson est de 3 hectares, variant selon les ressources alimentaires. Cet espace doit être connecté à d'autres pour assurer la viabilité de la population. Le Hérisson a besoin d'une dizaine d'abris pour se reposer, hiberner ou élever ses petits. Le cimetière est un endroit paisible et idéal pour ce discret colocataire !

Entre les papillons et les chants des oiseaux, le cimetière du Bon Pasteur à Fougères est aussi un lieu où la flore se développe simplement. Les pesticides sont interdits et les espaces enherbés ne sont tondus qu’une fois dans l’année. Entre les pierres et les tombes, on trouve le Cymbalaire des murs (cymbalaria muralis). Appelée aussi Ruine de Rome, cette plante aime les vieux murs où elle se développe pour former de petits tapis denses de fleurs violettes et jaunes. Elle peut s'enraciner dans une fissure et recouvrir année après année une surface plus importante. Cette plante a simplement besoin qu'on la laisse s'exprimer ! En évitant de l'arracher, on permettra à de nombreux insectes de se nourrir de ces fleurs délicates, tout en rendant le cimetière plus coloré et accueillant.

 

Cymbalaire des murs ©Adélaïde Vialla

Plus loin, des petits lézards gris et marrons se promènent entre les pierres. Ce sont des Lézards des murailles, une espèce commune des murets et des murs de maison. Ils trouvent dans cet espace de nombreux abris dans les fissures et les trous des murs ou des tombes. Ils se nourrissent également d’invertébrés qui vivent dans le cimetière. On croise encore d'autres oiseaux comme la Linotte mélodieuse ou encore la Grive musicienne, qui laisse des traces de son passage… Quelques coquilles d'escargot laissées à l'abandon, dont elle est grande amatrice.

Les papillons, moins présents en 2024 en partie à cause d’un été pluvieux, sont tout de même là. On aperçoit le Moro-sphinx, qu'on pourrait confondre avec un colibri en raison de son vol stationnaire. Il butine les fleurs en journée… alors qu'il s'agit d'un papillon de nuit ! Certains rhopalocères (papillon de nuit) sont très actifs le jour. Le Moro-sphinx aime les essences fleurissant au printemps et à l'automne, qui sont les périodes de vol des adultes. Il est fortement attiré par les fleurs de lavande, de menthe, et d'autres espèces aromatiques. Les chenilles auront besoin de plantes de la famille des gaillets et des stellaires pour se développer et permettre l'arrivée de nouvelles générations.

Entre deux tombes, une Belle Dame sur des fleurs en plastique, qu’elle ne butinera pas longtemps, ayant compris la farce... 

Au détour d'une allée, nous croisons un Écureuil roux qui se précipite dans le cèdre voisin, où résonne le chant du Serin cini, un passereau discret mais reconnaissable grâce à sa couleur jaune vif.

 

Espace non tondu au cimetière du Bon Pasteur © Adélaïde Vialla

Cette visite au cimetière du Bon Pasteur nous a permis de découvrir une faune et une flore riche, des allées où l'herbe pousse comme bon lui semble, où la biodiversité peut s'épanouir en toute tranquillité. De nombreux gestes Refuges LPO ont été mis en place par la commune de Fougères, sur ces 6 refuges actifs aujourd'hui !

Merci à Adélaïde Vialla (chargée d’étude naturaliste) et à Thibault Desgarden (bénévole) pour la visite par procuration et les photos des espèces à travers le cimetière du Bon Pasteur.