Vous avez dit busards ?

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Parc de protection

Parc de protection © Jean-Pierre Dulondel

Sur le plateau du Neubourg, dans l’Eure, un couple de busards Saint-Martin a décidé de construire son nid dans un champs de luzerne, chose peu courante, puisque d’ordinaire nos chers oiseaux préfèrent établir leur nid dans les céréales du type orge ou blé !

C’est donc aux alentours du 25 mai 2024 que la dame Saint-Martin a commencé sa ponte qui durera huit jours, pour donner quatre œufs, ce qui fait un œuf tous les deux jours !

Une personne postée à environ 300 mètres, chargée de surveiller ce secteur et faisant partie du groupe de bénévoles (18 personnes) dans le département de l’Eure, suppose la présence d’un nid dans ce champ suite à une altercation entre la femelle busard et une corneille qui s’est aventurée trop près du nid.

Après quelques 8 heures d’observation sur le terrain afin d’affiner la position approximative du nid, le drone est envoyé en exploration au-dessus de la parcelle pour trouver et géolocaliser le nid. Un premier passage fût un échec, car dans la luzerne, pas de repère comme dans le blé ou l’orge où nous avons des rails de traitement au sol qui nous servent d’axe de recherche. L’information relayée à la DDTM de l’Eure, celle-ci contacte l’exploitant, lui précisant qu’un nid est dans sa parcelle et que l’espèce étant protégée (elle fait partie de la Directive oiseaux de l’éco-conditionnalité PAC (Politique agricole commune) européenne), il doit laisser les bénévoles de la LPO Normandie entrer sur la parcelle pour contrôler le nid et poser une protection si nécessaire.

C’est donc à 4 personnes que nous avons refait un passage de drone après avoir attendu 1h30 que dame busard décide de sortir du nid pour avoir une triangulation et une meilleure précision quant à la position du nid. Le drone est donc envoyé pendant que des observateurs, avec jumelles et longues-vues, guident le pilote de l’engin pendant le vol. Le nid enfin trouvé, le pilote laisse le drone en vol stationnaire le temps qu’une personne aille au nid pour mettre un piquet faisant office de balise pour le retrouver plus facilement lors de la surveillance au drone ou pour poser un parc grillagé de 3 m x 3 m si besoin !

" Arrivé au nid, l’observateur trouve quatre œufs au milieu d’un nid confortable d’environ 35 à 40 cm de diamètre fait d’herbes épaisses."

Pose de protections pour le nid de busards

Pose de protections © Valérie Bruneau-Querey

Suite au constat de la présence effective du nid, un bénévole prend contacte avec l’exploitant, lui demandant quand la fauche de la luzerne doit être faite. L’agriculteur ayant répondu que le travail de coupe doit être fait dans 3 jours, Jean-Pierre et Valérie, qui sont en charge du nid, s’organisent pour la pose du parc le lendemain. Comme d’habitude, Valérie prend des photos en guise de constat.

Un contrôle est fait quelques jours après pour voir si tout se passe bien. Arrivés sur place, la femelle ayant décollé, les bénévoles constatent qu’il n’y a que trois œufs… Une prédation de corneille ou de goéland très présents aux alentours semble être à l’origine de la disparition d’un œuf.

Rentrée chez elle, Valérie regarde les photos prises, et découvre avec surprise en faisant un agrandissement que le 4ème œuf a peut-être été éjecté hors du nid à notre arrivée lors de l’envol de la femelle. Elle appelle son co-équipier pour avoir confirmation et celui-ci décide qu’il faut retourner sur place voir ce supposé œuf ! Sur place, à sa grande surprise, Valérie découvre bien à 20 cm du nid, sous l’herbe, un œuf (flèche rouge sur la photo). Est-ce le choc de l’expulsion du nid qui a causé l’éclosion prématurée, ou une coïncidence ?

Nids avec trois œufs dedans et un œuf hors du nid

© Valérie Bruneau-Querey

" Un poussin poussait des petits cris et était en train de casser la coquille pour s’en extraire ! "

Le fait est là, un jeune est en train de naître dans les mains de Valérie qui s’empresse de remettre l’œuf avec les autres. La question pour nos deux amis protecteurs se posent quant à la survie du l’oisillon

Après quelques jours, Jean-Pierre décide d’aller contrôler le nid, et trouve avec joie quatre poussins en forme, le jeune a survécu à l’incident.

Eclosion des œufs dans le nid de Busard cendré

Éclosion © Valérie Bruneau-Querey

4 poussins dans le nid

© LPO Normandie

Une seconde fauche doit être faite dans quelques jours, nous allons devoir poser un filet sur l’enclos pendant la fauche, les juvéniles quasi volants vont être effrayés par les engins et, n’étant pas capables de faire une grande distance, risquent d’être happés par les machines.

Les jeunes ont maintenant quatre semaines et sont presque volants ! Après avoir à nouveau contacté Ludovic (Exploitant Bio), et la seconde fauche doit avoir lieu dans les 2 jours qui suivent. L’équipe s’organise pour être sur place pour poser le filet de protection, le temps que l’exploitant coupe la luzerne.

C’est à 4 personnes que l’on posera le filet, après que deux des quatre jeunes se soient envolés hors du parc et posés dans la luzerne devant être coupée. Une frayeur pour l’équipe… Pascal et Jean-Pierre retrouvent les poussins aventuriers dont un s’envole et se pose dans la parcelle de lin et n’en bougera pas. L’autre poussin repart en sens opposé et se pose à la limite du champ de pommes de terre et de luzerne qui n’est pas encore coupée. Nous attendons que l’employé de Ludovic coupe autour du parc pour finalement enlever le filet protecteur.

Jean-Pierre, soucieux que l’autre poussin ne se soit pas suffisamment éloigné, reste à surveiller. A juste titre car ce juvénile dans la luzerne non coupée s’est envolé juste devant le tracteur pour retourner dans le parc avec ses congénères qui attendront quatre jours supplémentaires pour partir définitivement hors du parc que nous avons enlevé le 05 août.

Entrainement au vol des jeunes busards

© LPO Normandie

C’est une histoire qui finit bien, mais ce n’est pas toujours le cas pour de nombreux jeunes busards pour lesquels nous n’avons pas eu le temps de trouver les nids, faute de bénévoles, vu les superficies de céréales dans le département. C’est un total de 33 nids surveillés cette année sur les 36 supposés après avoir trouvé 36 couples