Dans une décision historique rendue le 20 mars 2023, le Conseil d’État avait enjoint à l’État de mettre en place dans un délai de 6 mois des fermetures spatiales et temporelles des pratiques de pêche responsables des captures de dauphins dans le Golfe de Gascogne. Ce jugement faisait suite à des recours formulés par France Nature Environnement, Sea Shepherd France et l’association de Défense des milieux aquatiques, et suivait les recommandations du Conseil international pour l'exploration de la mer (CIEM).
Le gouvernement s’est donc exécuté et vient de soumettre à la consultation publique obligatoire un projet d’arrêté établissant des mesures visant la réduction des captures accidentelles de petits cétacés par les engins de pêche.
Changer pour que rien ne change
Le texte proposé interdit les pratiques mises en cause (chalutage pélagique et fileyage) du 22 janvier au 20 février pour les années 2024 à 2026 dans le Golfe de Gascogne. Alors que 4 semaines d’interruption de la pêche seraient de toute façon insuffisantes pour épargner les dauphins selon le CIEM, les possibilités de dérogations ne devraient en réalité rien changer à la situation. En effet, seront exemptés les navires s’engageant à s’équiper de dispositifs de réduction des captures, dont l’efficacité n’est pas démontrée, OU de caméras embarquées, sans effet sur la mortalité des cétacés. En outre, ces équipements avaient déjà été rendus obligatoires pour les chalutiers pélagiques par un arrêté du 27 novembre 2020 et pour les fileyeurs par deux arrêtés publiés respectivement le 29 décembre 2022 et le 31 janvier 2023, ces deux derniers étant inexplicablement abrogés par le nouvel arrêté aujourd’hui soumis à consultation. Dans les faits, la quasi-totalité des navires concernés pourra donc continuer à pêcher tout l’hiver.
La présence du dauphin commun est menacée sur les côtes françaises. Ce grand amateur de poissons frais est en effet décimé par les filets des bateaux de pêche dans lesquels le mammifère marin se retrouve piégé et meure d’asphyxie, incapable de se dégager pour remonter respirer à la surface. Il est estimé qu’environ 10000 cétacés périssent ainsi chaque hiver dans le Golfe de Gascogne.
Sous couvert de répondre à l’injonction du Conseil d’Etat afin de protéger les dauphins, le gouvernement permet en fait aux bateaux de pêche de poursuivre en toute impunité le massacre. Cet arrêté est une mascarade qui constitue à la fois une insulte méprisante envers la justice et la biodiversité. Jeudi dernier, lors du Conseil national de la refondation, j’ai interpellé le Président de la République pour lui rappeler qu’il était urgent de prendre des mesures à la hauteur des enjeux pour épargner les dauphins, tout en garantissant une juste indemnisation des pêcheurs. Aucune réponse à cette sollicitation...