Notre action vise à la fois l'arrêté du 21 février 2024 fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup, et l'instruction de la préfète coordinatrice du Plan national d'actions (PNA) pour le loup et les activités d'élevage du 23 février 2024.
En dépit d’une large contestation citoyenne, le nouveau PNA 2024-2029 a été adopté à la veille de l’ouverture du Salon de l’Agriculture, en février dernier. Alors que l’objectif d’un PNA est en principe de garantir la conservation d’une espèce, l’État facilite encore plus le tir de loups, tout en appuyant la volonté de l’UE de rabaisser le niveau de protection du grand prédateur… Une première dans l’histoire d’un PNA !
Pourtant, en tant qu’État membre de l’UE et signataire de la Directive « Habitats », la France ne peut décider seule de réduire l’effectivité de la protection du loup tant que l’espèce n’a pas atteint un bon état de conservation et reste strictement protégée aux niveaux européen et international.
En application directe de ce nouveau PNA, l’arrêté interministériel du 21 février 2024 s’inscrit dans la continuité d’une succession d’arrêtés qui, au fur et à mesure des années, facilitent toujours plus les possibilités de destruction du loup, sans véritablement chercher à améliorer la protection des troupeaux par d’autres solutions satisfaisantes, et ce en méconnaissance de l’article L.411-2 4° du Code de l’environnement.
De plus, l’État aurait dû effectuer un bilan de l’application du précédent arrêté cadre avant la rédaction du nouveau, afin notamment de vérifier son efficacité, et le cas échéant, ses limites ainsi que le respect de sa mise en œuvre par les préfets de département, ce qui n'a pas été fait.
Avec 148 loups tués au 12 septembre, les orientations de cette politique publique ne cessent d’interroger, alors que selon les dernières données de l’Office français de la biodiversité (OFB), la population de loups a régressé de manière fort inquiétante de 9% en 2023 - une première depuis le retour spontané du grand prédateur en France au début des années 90. Et d'autant plus aussi que dans les départements de présence ancienne du loup, où les moyens de protection sont mis en œuvre depuis plus longtemps, les dommages ont baissé depuis l'année dernière et le début de cette année.
Compte tenu des irrégularités qui, selon nous, entachent à la fois l’arrêté interministériel du 21 février 2024 et l’instruction de la préfète du 23 février 2024, nos associations ont d’abord demandé leur retrait aux ministres de l’Agriculture et de la Transition écologique, par l’intermédiaire d’un recours gracieux déposé le 22 avril 2024. Face au silence des deux Ministères, nos associations n’ont donc eu d’autre choix que de saisir le Conseil d’État d’un recours contre le gouvernement pour excès de pouvoir.
Alors qu’aucune étude ne prouve l’efficacité des tirs létaux pour diminuer la déprédation des loups sur les troupeaux domestiques, il est consternant de voir le gouvernement s’obstiner dans la voie court-termiste de la régulation, plutôt que celle, plus durable, de la coexistence. Plus de 30 ans après son retour en France, il est grand temps d’admettre que le loup est présent pour longtemps, et va continuer à gagner de nouveaux territoires.
Pour nos associations, il est donc essentiel d’anticiper et d’accompagner les éleveurs pour mettre en œuvre le triptyque de protection qui a fait ses preuves : chiens de protection, clôtures et présence humaine auprès des troupeaux.
* Pour les scientifiques, le loup ne serait dans un état de conservation favorable en France qu’à partir d’une population de 500 individus reproducteurs, soit une population totale d’au moins 2500 individus matures sexuellement.