L’arrêté ministériel triennal du 27 août 2019 fixait pour la période 2019-2022 pour chaque département français des plafonds de destruction des grands cormorans dans les limites desquels les préfets pouvaient autoriser la régulation dérogatoire de cette espèce protégée pour les piscicultures subissant d’importants dommages malgré des mesures de protection ainsi que sur les cours d’eau où la prédation exercée par le Grand cormoran constituerait une menace pour la conservation de poissons patrimoniaux, et en l’absence d’alternative satisfaisante aux tirs.
Considérant que le risque pour les poissons concernés n’était jamais démontré, la LPO a contesté l’application de cet arrêté ministériel dans 17 départements depuis sa publication. Quinze arrêtés préfectoraux (Alpes-Maritimes, Aveyron, Corrèze, Doubs, Eure, Eure-et-Loir, Lot-et-Garonne, Nièvre, Nord, Pyrénées-Atlantiques, Savoie, Tarn, Var, Vaucluse, Haute-Loire) ont ainsi été annulés par les tribunaux, les 2 derniers (Côtes-d’Armor, Finistère) étant toujours en attente de jugement.
Dernier en date, le Tribunal administratif de Lille a annulé par un jugement du 6 février 2023 l’arrêté du 20 septembre 2019 du Préfet du Nord autorisant la destruction de 100 grands cormorans pour la saison 2019-2020. Une nouvelle fois, le juge a constaté que le Préfet n’apportait pas la preuve de l’impact du Grand cormoran sur les populations de poissons protégés.
La législation a changé
En septembre 2022, tirant les conséquences de toutes ces annulations contentieuses lors du renouvellement de l’arrêté cadre triennal permettant aux préfets de prendre des dérogations à l’interdiction de détruire cette espèce protégée, les ministères de l’Écologie et de l’Agriculture ont décidé dans un arrêté ministériel du 19 septembre 2022 de ne fixer aucun quota de destruction en eaux libres pour la période 2022-2025, mais seulement à proximité des piscicultures..
Insatisfaite de cette décision, la Fédération Nationale de la Pêche en France avait alors saisi le Conseil d’État d’une demande de suspension de cet arrêté ministériel en tant qu’il mettait en danger certaines espèces de poissons menacées ou protégées. Dans une ordonnance rendue le 10 novembre 2022, le Conseil d’État avait rejeté cette requête.